On a failli avoir un doute mais, force demeure aux croyances ancestrales : conformément aux canons de la mythologie et de l’Histoire égyptiennes, Pharaon est bel et bien immortel. Dans le cas précis de son incarnation sous la forme d’un quartette originaire de Philadelphie, baptisé PHARAOH, on a pourtant cru que le principe de mortalité pouvait s’appliquer. Fondé en 1997, ce groupe avait débloqué son compteur discographique cinq ans plus tard avec l’album « After The Fire » (2003). A dater de ce début solide, PHARAOH se fit fort de montrer à intervalles assez réguliers sa fidélité au Power Metal : on en veut pour preuve « The Longest Night » (2006), « Be Gone » (2008) et « Bury The Light » (2012). Puis, plus rien…
Neuf ans d’un silence discographique, enfin brisé par « The Powers That Be ». Bénis soient Osiris, Isis, Horus, Rê, Seth, Anubis, Sekhmet et consorts, PHARAOH trône à nouveau en majesté. Car, loin d’être un retour laborieux, en mode petit bras, « The Powers That Be » affiche un appréciable équilibre entre la tradition bien(trop) balisée du Power Metal et des velléités plus complexes, progressives, sons le terme. Pour s’en convaincre, il suffit de subir les assauts puissants mais subtils du titre introductif et éponyme. Saluons d’entrée de jeu l’abattage de la section rythmique, avec ces lignes de basse véloces et nerveuses (Chris Kems au service) et ce jeu de batterie tendu (Chris Black en position, par ailleurs actif en tant que batteur ou chanteur), où la complexité relative n’obère en rien la force des impacts. Au niveau des guitares, on trouve d’un côté des riffs simples et effilés, d’un autre des solos intelligemment construits et délivrés, de manière à ce que s’équilibrent dextérité, feeling et sens de la mélodie.
Le chant de Tim Aymar combine également une nervosité de bon aloi et une capacité à délivrer des points de repères mélodiques, au premier chef desquels on trouve logiquement un refrain entêtant. Rien d’étonnant à constater la qualité de la prestation du sieur, que j’ai à titre personnel découvert en 1999, à la parution de « The Fragile Art Of Existence », premier et unique album studio de CONTROL DENIED, projet fondé par l’immense guitariste Chuck Shuldiner, maître à penser de DEATH, à ce titre co-géniteur du Death Metal.
Cela dit, un titre ne fait pas un album. Fort heureusement, la suite confirme cette capacité à combiner fort adroitement les rythmiques percutantes et complexes, avec des points de repères mélodiques solides, tant sur le plan instrumental (ces solos de guitare, ces arrangements acoustiques) que vocal (oscillant entre nervosité presque rauque, incursions maîtrisée vers les hauteurs, registre medium plus tempéré). Tout l’album se trouve illuminé par des solos et des harmonies de guitare qui rappellent immanquablement l’univers d’IRON MAIDEN. Sur les passages les plus carrés et mélodiques, on songe également à RUNNING WILD. Seulement, PHARAOH insuffle à ces influences un élan fougueux quasi-systématique, une approche élégamment musculeuse et tendue.
Cet art des contrastes anime positivement les compositions de l’album, qui demeurent dans des formats concis. Hormis le relativement bref acoustique « Waiting To Drown » (2’41), les autres morceaux s’étagent entre plus de quatre et moins de sept minutes. Ce qui laisse tout loisir de mettre en place des dramaturgies concises, percutantes, systématiquement génératrices de tensions mélodiques fructueuses.
D’un classicisme assumé, « The Powers That Be » n’en constitue pas moins un album débordant d’énergie, de maitrise et de passion, ce qui le rend fort plaisant à l’écoute.
Alain Lavanne
Date de sortie: 18/06/2021
Label: Cruz del Sur Music
Style: Power Métal
Note: 17/20
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