Nous vous avons parlé récemment d’ANEMIA, groupe de deathcore Valentinois, à l’occasion de la sortie de son nouvel ep « Disaster // Disease » (pour la chronique, c’est par là : clic!).
Enthousiasmés par la qualité de cet ep, nous avons voulu en savoir plus sur le groupe.
Entretien exclusif avec Yann Genevois, batteur du combo.

1) Salut Yann ! Tu es donc le batteur d’ANEMIA. Tout d’abord, peux-tu nous présenter un peu le groupe et son histoire ?

Salut Olivier ! Alors, Anemia, c’est un projet de métal moderne français qui a démarré en2019. Au départ uniquement instrumental, le premier EP « Virtual Destiny » proposait du djent baignant dans l’univers de la technologie (utilisation de glitch, de sons industriels, etc.) Ensuite, avec l’arrivée de deux chanteurs, le projet s’est rapproché de l’esthétique deathcore (avec des sonorités assez lugubres, des rythmes souvent complexes, des riffs agressifs et des nappes d’ambiances mélodiques). Il y a également des influences électro qui viennent ponctuer le tout grâce au leader du projet : Sacha Clément (compositeur/bassiste) mais également par le guitariste et co-leader de « Dispersion » Nicolas Mendes. On a donc des touches d’électro indus et de trap par exemple qui viennent alimenter notre nouvel EP « Disaster // Disease ». Personnellement, j’ai rejoint le projet en juillet 2022, je suis le dernier à être arrivé. À ce moment, les autres membres du groupe étaient déjà en train de plancher sur le deuxième EP.

2) Pourquoi ce nom, ANEMIA ?

C’est un jeu de mots en fait. ANEMIA, c’est l’anglais d’Anémie. L’Anémie, c’est une maladie qui plonge celui ou celle qui la subit, dans un état d’intense faiblesse qui peut notamment être dû à un manque de fer dans le sang. Et donc, pour pallier à cet état de faiblesse, Anemia vient en quelque sorte agir comme une perfusion de fer, et donc ramener la dose nécessaire de métal dans le sang.

3) Quelles sont vos influences musicales ?

Nos influences sont assez variées, néanmoins on reste tous des fans de métal (old school pour certains et new school pour d’autres). Globalement dans le groupe on se retrouve tous principalement autour de l’esthétique deathcore et djent, et c’est ce qu’on fait, donc en fait tant mieux. Patrick (screamer / fry scream) a notamment une grosse influence metalcore, mais aussi plus généralement une excellente culture en ce qui concerne le métal (ses références principales seraient plutôt : Slipknot et Architects). Fabien (chanteur/ Growl) aime aussi tout ce qui est black métal et death mélodique (Amon Amarth, Slaughter to Prevail). Sacha (bassiste, leader, compositeur) est vraiment un gars qui s’intéresse à beaucoup d’esthétiques. Pour schématiser, il s’intéresse particulièrement au deathcore et au djent, mais aussi à l’électro, la trap, et beaucoup au jazz moderne. (Groupes préférés : Ten56, Vildhjarta, Allt). Nicola lui, c’est un
fan invétéré de Archspire, s’il ne vous l’a pas déjà dit d’ailleurs ! C’est un mec qui bosse à fond sa guitare donc il aime évidemment le métal, mais en parallèle c’est également un amoureux de technical death et surtout d’électro (notamment d’organic
bass et de melodic techno). Il a un projet d’organic bass qui vaut le coup d’œil d’ailleurs ! « NCMD » si vous aimez les jeux vidéo sombres et anxiogènes comme « Half Life », ça vous ravira. (références : Archspire, N’TO)

4) Comment définissez-vous votre musique ?

Je dirais qu’on essaye de faire ressortir au mieux toute une palette d’émotions chez l’auditeur, et de prendre aux tripes de différentes façons. La haine, la colère sont représentées par les fondations mises en place par la batterie, la voix et les riffs agressifs de guitare. Toutefois on retrouve parfois une forme de mélancolie, de tristesse ou de sérénité grâce aux mélodies et aux ambiances planantes. Et enfin pour couronner le tout, on sait ramener l’auditeur dans une ambiance angoissante, oppressante et anxiogène quand il le faut grâce au travail de sound design. C’est donc constamment un jeu d’équilibrage qui consiste à parfaitement doser les passages entre diverses émotions, pour au final créer un tout qui nous ressemble, et dans lequel on veut que les gens se reconnaissent aussi.

5) En 2021, vous aviez sorti votre premier EP « Virtual destiny ». A l’époque, le groupe était encore uniquement instrumental. Était-ce un choix de votre part ?

Non, ce n’était pas un choix. Sacha, à l’époque, cherchait des musiciens pour le chant et la guitare, mais il n’a pas perdu de temps, il a continué de composer pendant que lui et les autres membres
cherchaient des gens à intégrer au projet ! Au départ, le projet était composé de trois amis du conservatoire, et pour Sacha, c’était ses tout débuts dans le métal donc forcément, ils avaient très peu de contacts avec la scène métal locale. Donc ils sont partis sur l’idée de créer un EP l’instrumental tout en gardant à l’esprit que si un jour, ils avaient l’opportunité d’intégrer quelqu’un à la voix, alors ils le feraient. Trouver d’autres membres restait alors un objectif pour
eux.

6) Est-ce difficile de pallier à l’absence de chanteur dans un groupe ? Comment faire pour garder l’attention de l’auditeur ?

Oui, c’est assez difficile. Mais pour pallier à ce manque, à l’époque Sacha sa philosophie c’était plutôt : au lieu de partir sur une structure traditionnelle (couplet-refrain) qui se prête plus à des morceaux où l’attention est captée par le chant, il était plutôt parti sur l’objectif d’amener l’auditeur d’un point A à un point B sans qu’il ne sache vraiment par où il allait passer. L’enjeu était donc de toujours susciter l’intérêt, en jouant sur l’effet de surprise. Au final c’est un peu resté maintenant qu’on a du chant, mais c’est devenu un des éléments clés du projet et de son identité !

7) Après la sortie de « Virtual destiny », vous avez recruté non pas un, mais deux chanteurs (chez ANEMIA, c’est tout ou rien !, ndlr). Pourquoi ce choix ?

Patrick a tout d’abord rencontré Sacha dans un concert quelques semaines avant que Virtual Destiny ne sorte. Il avait arrêté avec son ancien groupe et il a demandé à Sacha s’il cherchait un chanteur. Patrick lui a fait écouter ce qu’il faisait, et Sacha l’a intégré au projet. Ensuite, ils ont sorti « Shadow » ensemble. Quand ils ont commencé à composer «Disaster // Disease », Patrick et Sacha avaient pour idée de faire un featuring avec un deuxième screamer au growl, trouvant l’idée intéressante. Patrick a donc recommandé Fabien à Sacha car ils se connaissaient déjà depuis longtemps. Une discussion les a ensuite amenés à regarder un clip d’In Arkadia dans lequel il y a deux chanteurs. Après ça, l’idée leur a parue évidente, et ils ont intégré Fabien. A deux, ça leur permet d’apporter un ensemble vocal plus complet. Patrick apporte globalement l’influence metalcore et Fabien le black/death.

8) Comment vos deux vocalistes se répartissent-ils les passages chantés ?

Pour le chant, globalement Patrick effectue tout ce qui est chant middle scream avec du débit et Fabien lui, est plutôt présent sur le côté growl grave et fait généralement des rythmiques plus simples et des valeurs longues. Les deux chanteurs se rejoignent souvent sur des passages forts, type breakdown où il faut envoyer : à ces moments-là, ils chantent en même temps pour donner encore plus de puissance. Cependant l’autre partie du temps, on aime jouer sur le question / réponse entre les deux voix, ce qui nous permet également d’un point de vue des paroles, d’attribuer à chaque chanteur un rôle ou un personnage différent !

9) Vous venez de sortir votre nouvel EP « Disaster // Disease ». Où a t’il été enregistré, et comment s’est passé l’enregistrement ?

L’enregistrement a été auto-produit dans le home studio de Sacha. Sacha a écrit la quasi-totalité de l’instrumentale de son côté. Le chant a été enregistré chez nos amis/collègues Jerem et Mody de
« Save’n’retry ». (On vous conseille d’écouter leur projet, c’est vraiment quali et ils bossent dessus comme des acharnés. Faut dire qu’ils nous aident énormément donc on essaye de leur rendre la pareille !) En terme d’écriture, nous avons tout de même essayé de tous co-écrire la musique de ce nouvel EP pendant des sessions où on a fait en sorte de tous se réunir, afin que chacun apporte ses influences et ce qu’il aime personnellement. Sacha est d’ailleurs un excellent leader de projet qui sait s’ouvrir et laisser la place à ses musiciens, tout en sachant cadrer et organiser les choses en temps et en heure. Il a de grandes compétences.

10) Comment se passe la composition au sein du groupe ?

Généralement, Sacha et Nicola bossent sur une instru ensemble, ils nous partagent l’avancée régulièrement afin que chacun puisse apporter ses idées. Et une fois qu’on a une maquette qui tient la route, on se voit tous ensemble pour poser les voix et discuter des paroles. En général, on aime bien bosser d’abord la rythmique du chant plutôt que la mélodie pour avoir un rendu cohérent avec l’instrumentale et un rendu plus impactant à notre goût. La difficulté est donc de s’appuyer sur la rythmique pour ensuite trouver des paroles qui collent à la fois au sens et au nombre de syllabes !

11) Le concept de ce deuxième effort est la catastrophe de Tchernobyl, un sujet difficile. Qui en a eu l’idée ? Qui est en charge des textes ?

L’idée de Tchernobyl a été lancée par Nicola ! Nico s’intéresse énormément à cette catastrophe. C’est un grand
connaisseur du sujet. L’idée est arrivée à peu près au moment où Nicola nous parlait du jeu vidéo « Half-Life » et de la série « Tchernobyl » qui relate les événements. Et voilà, ensuite,
on était partis direct sur l’idée. La catastrophe de Tchernobyl nous paraissait très appropriée pour exploiter des ambiances sombres et anxiogènes dans les morceaux qui allaient arriver. D’autant plus qu’on a vite trouvé des sonorités qui nous semblaient très cohérentes avec le thème. Les paroles ont été écrites intégralement par Patrick ! Il a fait un gros gros taff d’écriture, et même souvent en live action des répètes, moi, je sais pas
faire deux choses en même temps mdr.

12) Quels sont les premiers retours que vous avez eu sur « Disaster // Disease » ?

Eh bien, des super retours !! Autant de nos amis, de nos proches, de gens qui ont découvert le projet ou encore de nos auditeurs de longue date. Les gens en général et mes profs en particulier, ont reconnu le taff de mix/mastering qui rappelons-le a été intégralement géré par Sacha ! On a également eu des retours en masse sur nos réseaux sociaux et on ne pouvait pas être plus comblés je pense ! C’est vrai qu’à chaque fois on essaye de s’attendre au moins de réactions possibles, mais ça dépasse toujours de loin ce qu’on imagine en terme de proportions, et c’est génial pour nous. Notre petite, mais forte communauté est extrêmement impliquée et nous suit dans tout ce qu’on fait. C’est vraiment cool ! Mon meilleur ami a également fait une reprise de la cover de la pochette d’album (faite à l’origine par la copine de notre chanteur) et c’est quelque chose qu’on ne nous avait jamais fait mais qui nous a fait très plaisir !

13) Je présume que vous allez donner des concerts pour promouvoir votre musique. Déjà des dates de prévues ?

Tout à fait !! Le 19 avril dernier, on était présents à la péniche Loupika à Lyon, ça a bien pogoté ahah ! Maintenant on sera présents au festival « Bridge to Hell » à Crest le 9 Septembre ! Encore beaucoup d’autres dates sont en préparation mais pour le moment, on n’a rien le droit de dire… Ce qui est sûr en tout cas, c’est que ça va être bien pimenté !

14) Et maintenant, quelle est la prochaine étape pour ANEMIA ?

Jouer un maximum déjà ! On recherche activement des dates et des lieux de diffusion pour organiser des plateaux et jouer avec des groupes de la région. On vise pas mal de salles/festivals du coin, et on est en train de faire le nécessaire pour y jouer le plus possible ! Et sinon on travaille déjà sur les morceaux du prochain EP, et on parle justement en ce moment du prochain concept. Notre idée serait de réaliser un EP sur le thème des maladies mentales et notamment de la schizophrénie. On est également en train d’essayer de se construire une identité encore plus marquée en essayant d’introduire davantage d’electro dans nos morceaux et on est très fiers de la direction qu’on prend. On testera très sûrement ces nouveaux morceaux lors des prochaines dates d’ailleurs !

15) Quelques questions plus personnelles te concernant, si tu veux bien. On n’a finalement pas si souvent que ça l’occasion de donner la parole à un batteur !
Quand as-tu commencé à jouer de la batterie ? Et comment as-tu découvert cet instrument ?

J’ai commencé la batterie à l’âge de 5 ans ! Ma mère et mon père m’ont vu jouer sur une bassine avec des brosses à dents à l’âge de 2 ans et ils se sont dits qu’il fallait faire un truc de ce petit bout en couche dans la salle de bain de mamie. Et me voici timbalier ! Tada !

16) Beaucoup de batteurs de métal misent tout sur la vitesse et la puissance de frappe. Bien que tu sois capable des deux, je trouve que ton jeu est très groovy et créatif. Qu’est-ce qui est important pour toi dans la batterie ? Comment appréhendes-tu cet instrument ?

Ce qui est important, je dirais, c’est d’essayer de faire de son mieux et de clarifier ce qu’on veut exprimer. Certains leur kiff, c’est le tapis de double à 300bpm et d’autres l’efficacité des coups. Je crois que je suis entre les deux ahah, parce que je suis influencé par les deux. Et puis je pense être encore jeune, donc je cherche encore mon style de jeu et de frappe à vrai dire !! Mais en ce moment ce que je préfère, c’est un mélange de rythmes djent avec des équivalences métriques et des ghost-notes à la caisse-claire
(référence : Chris Turner de Ocean Ate Alaska, Et Pierre Rettien d’Hypno5e et Vertex) et des passages
rythmiques hyper changeants au tapis de double en binaire-ternaire et où aucune partie se ressemble (mon groupe préféré : Vildhjarta et le monstrueux Buster Odelhom)
J’appréhende la batterie par sessions de 3 à 4 heures de jeux généralement. Dans Anemia, j’essaye de jouer à l’identique les parties écrites sur les morceaux, c’est ça qui est difficile. Et dans Lyÿr, c’est moi qui
écris les parties batterie en live action (ensuite, je répète de mon côté avec les idées que j’avais mises en place avec le groupe) donc je crée d’avantage, et j’adore placer des équivalences rythmiques de partout, de la double et des ghost-notes à la caisse-claire.

17) Une de tes particularités, c’est de jouer dans plusieurs groupes de styles très différents (death métal, métal, jazz manouche, folk, etc). Est-ce important pour toi de conserver une variété de genres musicaux ? Qu’est-ce que cela t’apporte, et penses-tu que cela influence ton jeu au sein d’ANEMIA ?

Oui, pour moi, c’est extrêmement important de rester ouvert d’esprit et d’écouter différents styles de musique. Pour moi, c’est le piège dans lequel tombent beaucoup de musiciens.nes une fois que leur carrière
se lance : ils deviennent élitistes de leur propre esthétique musicale. Ça pour moi, c’est une immense connerie. Si on se réserve à un seul style (bien sûr, je comprends que ce ne soit que du kiff) on tourne au bout d’un moment en rond et au niveau créatif on aura rien de nouveau à apporter quoi… Donc oui, je pense sincèrement (même s’il est difficile de l’envisager) que d’écouter et de pratiquer d’autres styles musicaux permettent d’ouvrir le champ créatif et d’apporter des compétences à appliquer à d’autres
esthétiques. Mais malgré tout, mon style musical favori, je ne vais pas non plus me mentir à moi-même, ça reste le métal.

18) Quel est ton genre de prédilection en tant que batteur ?

Comme dit précédemment, mon esthétique de prédilection reste avant tout le métal, mais voici un panel de ce que j’écoute en ce
moment : métal, jazz moderne, électro : (Trap, Lofi, Organic Bass, alternative) rap français, Néo-classique, dub, musique Nordique, musique traditionnelle du Moyen-Orient et Folk de France.

19) Quels sont les batteurs qui t’ont influencé ?

Chris Turner (Ocean Ate Alaska), Buster Odhelom (Vildhjarta, Humanity’s Last Breath), Pierre Rettien
(Hypno5e, Vertex), Stefanie Mannaerts (Brutus), Mario Duplantier (Gojira).

20) Pour finir, as-tu des groupes ou artistes que tu aimerais nous faire découvrir ?

Vildhjarta, Humanity’s Last Breath, Hypno5e, Brutus, Sarab, Malicorne, Ten56, Ghostemane, Suicidboys, Ice3peak, Ólafur Arnalds , Jóhann Jóhannsson , Alt 236, Wallows, M83, Alcest, Architects, Billie Eilish, Daughter, King Gizzard and the Lizard Wizard, Summoning, Imminence, Përl, Chelsea Grin, Apparat, Hällas, CLANN, Danheim, Kalandra, Radiohead, Iron Maiden, Currents, Of The Trees.

21) Merci pour tes réponses Yann ! Je te laisse le mot de la fin pour les lecteurs de KAOSGUARDS !

Je pense que chacun doit se sentir libre de s’exprimer au niveau créatif et ne pas avoir peur de mélanger les esthétiques, de chercher, et de venir avec des idées nouvelles et fortes à défendre.

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Kaosguards boss

Un passionné de metal complètement fou qui joue des coudes à tous les concerts.