Si vous voulez la version courte, disons que NIGHTWISH, pionnier et fleuron du metal symphonique à chant féminin depuis bientôt 30 ans, propose avec « Yesterwynde », son dixième album studio, un bon album dans ce style musical, bien supérieur à la majorité des sorties de ce genre très en vogue depuis quelques années, et qui plaira à coup sûr aux amateurs.

Maintenant, pour celles et ceux que cela intéresse, voilà une analyse plus poussée, analyse subjective s’il en est puisque c’est autant le chroniqueur que le fan de la première heure qui vous la propose…

NIGHTWISH est l’œuvre de toute la vie de son créateur et principal compositeur Tuomas Holopainen (claviers).

Le maitre à penser s’est révélé au fil des années un excellent compositeur doublé d’un mélodiste hors-pair, et nous a habitué à un niveau de qualité extrêmement élevé tant dans la composition que dans la production ou l’interprétation.

Le précédent album « Human:// :Nature » en était d’ailleurs une éclatante démonstration, notamment en raison du second cd renfermant « All the works of nature which adorn the world », longue pièce épique ambitieuse de près de 30 minutes.

Cependant, le groupe a connu plusieurs changements de personnel au cours de sa carrière, les plus évidents étant le changement de chanteuse (Anette Olzon remplaçant la chanteuse originelle Tarja Turunen en 2007, puis Floor Jansen la remplaçant en 2013), mais la personnalité de Floor Jansen, ainsi que son talent et ses capacités vocales exceptionnelles font qu’elle a été acceptée par les fans et est largement considérée comme la meilleure vocaliste qu’ait eu le combo (ce avec quoi je suis parfaitement d’accord).

En même temps que le recrutement de Floor Jansen, Tuomas a également intronisé comme membre permanent Troy Donockley, un musicien irlandais de grand talent capable de jouer de beaucoup d’instruments (guitare, cornemuse, flutes, chant, etc) et apportant une touche folk à la musique de Nightwish.

Mise à part la vocaliste, deux autres membres plus discrets mais tout aussi importants ont quitté le groupe.

Tout d’abord le batteur Jukka Nevalainen, présent depuis les tout débuts du groupe, grand ami de Tuomas et batteur au groove remarquable, qui a été contraint pour raisons de santé de quitter le groupe en 2014. Il a été remplacé par Kai Hahto (Wintersun), un batteur technique mais plus froid et bien moins groovy que Jukka.

Puis en 2021, coup de tonnerre puisque Marco Hietala, bassiste et chanteur présent depuis 20 ans dans le groupe, décide de le quitter à son tour, soi-disant pour raisons personnelles, les tournées l’ayant apparemment usé (ce qui ne l’empêche finalement pas de continuer la musique, et même de tourner désormais avec Tarja Turunen, la première chanteuse de Nightwish !… Ambiance.).

Il est remplacé depuis par Jukka Koskinen, le bassiste de Wintersun.

Sauf que là encore, le musicien est moins visuel que son prédécesseur, avec un son de basse beaucoup plus convenu et classique, et sans la voix si particulière de Marco, qui était devenu un auxiliaire précieux au chant, apportant de la diversité et de la puissance.

Il faut ajouter à tout cela que Tuomas déclare depuis un moment être harassé par la pression qui pèse sur le groupe, pression qu’il a choisi de relâcher en créant Auri, un groupe de rock/folk dans lequel officient également Troy Donockley et la compagne de Tuomas, la vocaliste Johanna Kurkela.

Auri a sorti deux bons albums, très teintés folk, ne rencontrant qu’un succès commercial modeste, mais permettant à Tuomas de se libérer un peu des codes du metal et de laisser libre cours à son imagination musicale.

Il faut enfin savoir que NIGHTWISH, malgré tous ces changements et la fatigue de Tuomas, vient de re-signer un contrat discographique avec le puissant label Nuclear Blast pour plusieurs albums, ce qui ne devrait pas alléger la pression sur les épaules du leader du groupe.

C’est donc dans ce contexte particulier que se sont déroulés la dernière tournée du groupe et l’enregistrement de cet album.

Album pour lequel le groupe (mais probablement décidé par le seul Tuomas) a annoncé qu’il ne tournerait pas pour le promouvoir, ce qui, à l’heure du streaming et du téléchargement illégal, est très surprenant, la plupart des revenus des groupes venant désormais des concerts.

Donc, toute cette très longue introduction pour dire quoi ?

Hé bien pour faire remarquer que, pour les observateurs avertis, les indicateurs n’étaient pas au vert avant la sortie de l’album, et que cet album, s’il n’est pas mauvais (comment me pourrait-il au vu de la qualité de ses membres ?), ne tient pas la comparaison avec ses glorieux prédécesseurs.

Beaucoup de remarques viennent à l’esprit, à commencer par une baisse d’inspiration dans les compositions.

Les chansons s’enchainent sans beaucoup retenir l’attention de l’auditeur (certaines étant même dispensables, comme l’électro « The children of Ata », très moyenne et lorgnant presque vers Amaranthe, un comble !), la faute à des gimmicks « Nightwishiens » un peu trop marqués, voire un peu datés.

En effet, les sons de claviers émulant des instruments classiques sont devenus performants, mais l’ensemble sonne quand même un peu désuet en 2024.

Au rayon des déceptions, on notera également la performance de Floor Jansen, dont les lignes de chant sont assez peu inspirées, en plus d’être étonnamment mixées en retrait, et qui nous empêche de vibrer comme on a pu le faire sur de précédents morceaux (ré-écoutez donc sa performance sur « Ghost love score » en concert pour vous en convaincre).

On l’a déjà évoqué plus haut, mais la section rythmique est certes solide mais livre une prestation convenue et sans ce supplément d’âme qu’insufflaient Jukka Nevalainen et Marco Hietala.

Et mine de rien, le rythme des chansons pâtit de ce manque de puissance et de groove, sans parler de l’absence du chant de Marco.

Pour toutes ces raisons, on a régulièrement l’impression d’avoir affaire à un NIGHTWISH en mode pilote automatique, qui propose une musique de qualité et dans les canons de ce que l’on attend, mais sans ce supplément d’âme qui a donné des chansons exceptionnelles comme « Ghost love score », « Storytime », « Everdream », « She’s my sin » ou encore « The greatest show on Earth ».

Comme si Tuomas n’avait eu d’autre ambition que de livrer un album à son label afin d’honorer son contrat.

Restent quand même de bons moments, en particulier la chanson « The days of… » dont le pont symphonique réveille enfin le talent de mélodiste de Tuomas le temps d’un break exceptionnel, ou encore « Something wispered follow me », et son gimmick de guitare rappelant les regrettés Anathema.

Alors, que faudrait-il, après cette critique sévère, à NIGHTWISH pour retrouver de sa superbe ?

Probablement du repos, pour commencer.

Puis peut-être trouver un second souffle, qui pourrait passer par l’emploi d’un deuxième guitariste (autre que Troy), qui pourrait redonner de l’allant au groupe.

Cela n’a jamais été tenté par le groupe, mais pourrait redonner des perspectives à Tuomas.

Enfin, on connait la passion de Tuomas pour les musiques de film (le groupe reprenait déjà Hans Zimmer et Trevor Rabin en concert en 2009 !), ce qui transparait depuis longtemps, que ce soit au travers de longue pièces musicales (« The greatest show on Earth », « The poet and the pendulum », etc) ou carrément sur la précitée « All the works of nature which adorn the world », plus orchestrale que metal.

Peut être qu’intérieurement le musicien aimerait proposer une vraie musique de film et qu’accomplir ce rêve le libèrerait.

Lui seul le sait, mais on peut légitimement le penser.

Au final, on le répète, « Yesterwynde » est un bon album de metal symphonique à chant féminin, mais un album moyen de NIGHTWISH, qui devrait globalement plaire aux amateurs du style et du groupe, mais qui hérissera les réfractaires au genre.

On attendait mieux de NIGHTWISH, surtout après le très bon « Human:// :Nature ».

Maintenant, à vous de vous faire votre propre opinion !

Vega

Date de sortie: 20/09/2024

Label: Nuclear Blast

Style: Power Métal symphonique

Ecoutez ici

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Kaosguards boss

Un passionné de metal complètement fou qui joue des coudes à tous les concerts.