« A la croisée des vents » (2008) avait taillé une encoche dans le paysage Black Metal hexagonal. Encoche élargie par « La cité des vents » (2010) et surtout par le remarquable « L’esprit des vents » (2018), qui avait permis au groupe auvergnat de créer une brèche franche. Successeur attendu de cette trilogie venteuse, « Pierres brûlées » prolonge le parcours entamé et confirme l’approche à la fois fougueuse, épique et puissante qui caractérise le Black Metal du combo.
Premier avantage, les neuf compositions de l’album se trouvent judicieusement pourvues d’un son touffu, le mixage s’assurant d’une juste exposition des différents paramètres. En somme, même dans les moments les plus intenses et rapides, on est assuré d’entendre correctement la batterie et les guitares. Le chant se trouve volontairement mixé au milieu de la charge instrumentale, ce qui ne permet pas forcément de comprendre toutes les paroles de textes écrits en un français travaillé.
Le qualificatif intense vient d’être employé et il se fait que l’intensité s’impose comme la clé de voûte de l’album. On a presque constamment que le groupe se jette à l’assaut, faisant assaut de furie et de volonté d’en découdre. D’où des tempos très enlevés, avec un recours fréquent aux blast beats, fort heureusement pondérés par des cassures et des séquences davantage pondérées. Les riffs bourdonnent à tout va, créant une sensation de souffle acide ; fort intelligemment, les rythmiques se font ponctuellement très accrocheuses, voire pourvoyeuses de mélodies entêtantes. Une guitare acoustique apporte à l’occasion de salutaires motifs plus apaisés et lumineux.
Autre vecteur de férocité, le chant possédé de Spellbound, oscillant entre fureur expectorée, râle funeste et articulation relative. Indéniablement, le vocaliste vit pleinement des textes chiadés, offrant un écrin laudateur à la région Auvergne.
L’auditeur peut avoir par moment l’impression de suffoquer face à une emprise si impérieuse et véhémente, mais toute l’intelligence de l’écriture, des arrangements et de l’interprétation consiste à systématiquement placer un élément de contraste, qui vient rompre momentanément l’asphyxie en cours. Incontestablement, AORLHAC confirme les espoirs suscités par l’album précédent et démontre que l’on peut, en 2021, demeurer fidèle au fiel consubstantiel au Black Metal, sans verser dans le paupérisme sonore, que l’on peut se vouloir épique, sans sacrifier aux outrances orchestrales faciles. Au final, cet album se montre à la hauteur de son visuel et son écoute fait l’effet de subir l’avancée inexorable d’une coulée de magma en fusion.
Alain Lavanne
Date de sortie: 24/09/2021
Label: Les Acteurs de l’Ombre productions
Style: Black Métal
Note: 18/20
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