Contrairement à ce que laisserait supposer leur nom, les STONES OF BABYLON sont trois musiciens portugais, lisboètes pour être précis, ayant déjà sorti en 2919 un album, The Hanging Gardens. Loin d’avoir opté pour les solutions de facilité, les trois compères multiplient les choix ambitieux.
Tout d’abord, ils aiment manipuler des formats imposants comme des ziggourats. Jugez plutôt, le titre le plus bref, « The Fall Of Ur », dure tout de même 7’24, tandis que le plus long, « Anunnaki », culmine à 10’20, dépassant de fort peu les 10’17 de « Tigris & Euphrates » ; pour compléter le tout, comptez trois autres compositions monumentales (entre huit et plus de neuf minutes).
Ensuite, songez que STONES OF BABYLON pratique un Stoner Doom strictement instrumental ! Dans une combinaison de deux sous-genres privilégiant l’épaisseur, la lenteur et la lourdeur, d’aucuns pourraient légitimement craindre de manière anticipée un exercice de style monolithique, répétitif et ultra-référencé. Immanquablement, les esprits fainéants vont évoquer SLEEP, ce qui ne veut plus dire grand-chose de nos jours, tant les codes du groupe californien se sont trouvés réappropriés par des cohortes innombrables, au point d’être devenus l’équivalent de l’air qu’on respire dans ces territoires aux confins du Stoner et du Doom.

Traitons d’abord ces trois dimensions essentielles : 1° le goût pour les formats longs, 2° l’alliage Stoner Doom et 3° l’option strictement instrumentale. Par-delà les clichés et les références trop systématiques et paresseuses, STONES OF BABYLON transcende les obstacles assez simplement, c’est-à-dire à ne misant pas tout sur des riffs de mammouths, ni sur des rythmiques de mégalodons. Certes, les riffs qui sont débités au long des 54’ de cet album sont plutôt du genre épais, massifs, avec un rendu rêche qui en souligne la sévérité. Afin d’en nuancer le caractère brut de décoffrage, le guitariste Alexandre Mendes multiplie les variations franchement mélodiques ou psychédéliques, sans jamais se départir d’un cahier des charges caractérisé par un souci constant de lisibilité et d’évidence. Ainsi, le guitariste se trouve contraint à l’expressivité, plutôt qu’à la démonstration.
Idem concernant la section rythmique. Le bassiste João Medeiros développe certes un son grondant ; le batteur Pedro Branco se montre assurément sévère, voire franchement puissant dans son jeu. Pour autant, les deux compères parviennent fréquemment à mettre en place des séquences relativement apaisées, voire à faire montre d’une authentique subtilité. Voilà le secret des compositions de cet album : leur gestion de l’intensité et des contrastes, un tel dispositif permettant d’éviter l’écueil du monolithisme, de la répétition rythmique dogmatique, de la lourdeur et de l’épaisseur dogmatiques. N’allons pas en déduire que STONES OF BABYLON défriche un nouveau territoire ; mettons plutôt qu’il laboure des terres selon des procédés plus précautionneux, voire plus personnels.
Afin de répondre à une caractéristique franche et nette propre à l’identité de STONES OF BABYLON, à savoir une appétence pour l’Histoire antique et pour la mythologie mésopotamiennes, il faut bien reconnaître que STONES OF BABYLON a recours à des accords et à des atmosphères vaguement orientales, dont rien ne garantit franchement qu’elles évoquent de manière crédible la production instrumentale de l’époque. Mais ces inserts, combinés aux nombreuses oasis plus apaisées, parviennent à transcender l’ensemble et à éviter l’ornière du massif long, lourd et impénétrable, au bout du compte indigeste. STONES OF BABYLON ne se livre pas qu’à un exercice de style mais prend compte de mettre en place un contexte narratif et d’amorcer une narration dramatique évocatrice.

Alain Lavanne

Date de sortie: 21/11/2022

Label: Raging Planet records

Style: Stoner Doom Métal

Note: 16/20

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Kaosguards boss

Un passionné de metal complètement fou qui joue des coudes à tous les concerts.